RÊVE UN MATIN
c’était une série d’images
attendez
faite de chemins de fer et de proche banlieue
grillages métalliques, enfance, volets de plastique
haies de lauriers, impression de cyprès
de flou condensé, de folie vivante
je plongeais à chaque fois
en scrutant le réveil
dans cet espace
j’imagine
tel le lamantin qui enfin
s’est soustrait à tout prédateur
et ce depuis des siècles
de peu d’activité, comme s’il
avait échappé au plus intense des drames
le voilà qui mordille des nénuphars
dauphin passif
qui ne sait plus bondir
dont le museau a enflé
j’étais ce chant, je l’entendais
mais il y avait aussi
de la vivacité de l’espadon
s’il on peut dire que le lamantin est apathique
ce qui reste à prouver
disons qu’il s’est habitué
à son existence de rien
je plongeais intensément
dans cette semi-conscience à ma portée
et là où je vous ai dit toute son intensité
en évoquant l’espadon je vous éclaire
les pleurs du lamantin n’y suffiraient pas
elle avait la force d’un drame wagnérien
je pleurais donc et recherchais
cette déchirure qui m’était permise