Je ne vis que par de petits instants fortuits et fous, parfois où je marmonne et divague dans des collines, mais cela n’éveillerait que la honte de ceux qui m’ont connu, le rire de ceux qui passeraient et me reconnaitraient, le jet de pierres des enfants, et l’inquiétude, si ce n’est le rire aussi, des services de police ou hospitaliers. Ma vie est si claire pourtant, mais elle a pris un cours ou elle ne loge que dans des sinuosités. L’autoroute que je vois n’est pas pour moi, mais j’aime son chant. J’aime le chant des autres quand il est lointain où qu’il ne signifie rien, car c’est alors sa seule signification pour moi, sa seule utilité : un écho lointain qui me rassure, une chambre à louer où je pourrais un jour séjourner, un attroupement de semblables que je ne distingue pourtant pas, et qui me semblent sympathiques à ce prix. Comme ils roulent droit sur les autoroutes, cela me semble tellement difficile. Les voitures sont plus contrôlables aujourd’hui qu’avant, mais comment font-ils pour rouler des heures tout droit, avec de légers tournants, et sachant qu’une faute serait mortelle. Comment voudriez vous que je puisse faire pareil ? Mes sinuosités déjà sont complètes, douces, rêveuses et fragiles. Un poids lourd à coté, vous pensez que je pourrais l’éviter ?