Traces [extraits d’un journal, 2010]

Tu oublies souvent que je suis malade, délaissé et malade.

Tu oublies que j’ai souffert une angoisse qui a envahi jusqu’à mon moindre atome et que je vis au nom d’une chimère qui ne se trouve nulle part.

Cette chimère parfois s’élève, le long d’une muraille, elle lui inflige sa matière et s’infiltre par les brèches de ciment.

D’où peut-elle sortir, où s’est elle formée, léchée par quelle langue ?

Je ne sais pas ce qui la régit ou la précède, je sens son poids et sa texture de feuille, de nuage.

Est-elle vraiment ?

Elle n’est pas l’air bien qu’elle en crée, tout au centre de ma tête. Et par là s’infiltre toute l’angoisse du monde.

  »

Tout va finir d’ici cent ans.

Les derniers marionnettistes peuvent danser, rire et faire pleurer, diriger finement la marche à suivre, infliger des corrections et afficher des bons points, tout est condamné.

Condamné, inscrit au lent déclin, gravé dans nos esprits.

Le monde va finir, les banques sont à l’abîme.

Qui pourra se passer de notre triste planète au rire parfois touché ?

Triste morceau lunaire égaré dans le système d’une grande création.

Quelle bouffée d’oxygène me rassérène.

  »

Tout est vain. Rien n’existe.

Je suis mort, et alors ?

Dépossédé, sans n’avoir jamais rien possédé.

J’oublie tout. J’ai mal, ça crie en moi, ça hurle en moi, ça vomit en moi, ça mort en moi.

Je suis trépassé, je regarde le monde. Il n’y a pas de monde, il y a ma mort.

J’ai des plaisirs, ils se goinfrent et je n’ai plus faim.

Fantôme, revenant, spectre qui court à la vie ? Citoyen ?

Mort aux urnes.

  »

Je rentre souvent par le parc Monceau, tranquillement envahi par les effets progressifs d’un alcool, marches progressives vers une abstraction.

Sentiment d’absolu.

Ce n’est pas tout à fait le fumeur d’opium qui s’exécute, c’est son intention.

Les filles passent, le désir passe et décline.

Longs couteaux inaltérés.

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