eaux froides
par claire le 25 mars, 2013
tu remues une eau boueuse, couleur de merde
épaissie de boue,
volutes, où des bulles remontent…
tu enfonce la longue perche
que cherches-tu encore ?
la barque tourne autour de l’axe
de la perche,
de toi.
sous le ciel aux nuages épaissement couchés
la ligne d’horizon est hérissée d’arbres nus.
tout finalement s’est changé en boue :
une masse inerte
féconde dans quelques décennies.
mais je l’ai aperçu sur l’autre bord,
le contre-poison :
une forme qui inspire, un geste,
une façon différente de se tenir debout
un bruit qui bat suivant le rythme.
une main indique
les trous de rats dans les rives
et la vase fluide
la feuille déchirée hier
par le vent.
une froide pluie s’égoutte
sur des franges d’herbes
c’est l’hiver…
saison qu’on a vue se déployer dans le silence
une pierre roule et disparaît
dans l’eau fumante du rieu.
plus loin
un héros mortellement blessé ou presque
est assis dans la boue du chemin
sous le ciel las.
son épée à qui fut donné un nom
n’est qu’un trait gris dans l’herbe.
le héros pleure, les joues barbouillées, les yeux bouffis
une pie étend son aile
roide tout près de lui
il s’allonge.
diptyque
par claire le 12 mars, 2013
jour (donner le)
je me souviens
des petits corps chauds remuant
pour la première fois dans l’air
encore enduit de vernix
qu’on vous pose sur la poitrine
et qu’on tient bien serrés
de peur qu’ils ne glissent
sur le carrelage blanc au dessous.
qu’on tenait bien de ses mains d’adulte
doigts glissés sous les petits bras
de la petite tête mouillée
criant dans la main
à qui on murmure quelque chose.
petit visage
dans le creux de l’épaule
qui doit sentir l’odeur particulière
le mélange entre les deux peaux.
et le cœur, si fort et lourd dans l’émotion
et la fin de l’effort.
le sien
battant rapidement.
——————————-
exiler (s’)
tu as quitté ta peau
si visiblement, immédiatement.
elle est déjà celle d’un mannequin
oublié toute une nuit sous la pluie
et ton corps est déjà celui
d’une poupée d’autrefois
que l’enfant a laissée,
salie, pour grandir.
et ton visage n’a plus rien à voir avec toi
celui que je garde.
aucune de tes paroles
ne pourrait s’y dire
ni aucune de tes expressions
y jouer à nouveau son jeu de vivant.
je me penche sur cet étrange forme qu’on embrasse
dont le froid même
dément la nature humaine.
le si lent mouvement des paupières
leur faible papier de soie qui battait sur la flamme
égarée des derniers regards
je le garde.
je touche ta joue
pour toi
au cas où tu regarderais encore
de loin ce grand jouet perdu ce véhicule
qui t’a mené si bravement,
si longtemps.
Trois
par claire le 12 mars, 2013
ces trois couleurs
sont les trois seules couleurs du monde
trois lumières – et un monde incroyable
s’avance derrière elles
on voit son mouvement.
elles s’avancent toutes ensemble
dans une vague lueur de forge
un reflet un souvenir un retour de flamme
elles viennent
en avant d’un mur noir de suie
s’appuyant sur lui
ses briques immémoriales masquées.
on regarde ces serpents sans queue ni tête
qui toujours reforment le monde
et sifflent
dans le chaud silence
de ce monde ancien
dans ce noir matin
toujours naissant.
La rencontre
par claire le 18 février, 2013
c’est l’après-midi, en voiture sur une route à lacets. Une femme parle à la radio du livre qu’elle vient d’écrire, un livre consacré à un homme qu’elle n’a vu que quelques secondes, un vieil homme inconnu, plutôt petit, qui sur le quai du métro de la station Gambetta lui a souri, d’un sourire agréable, lui a dit quelques mots (qu’elle ne livre pas), et a sauté devant la rame à pleine vitesse.
Cet évènement qui, dit-elle, l’a « mise en mille morceaux », il lui a fallu bien du temps pour le voir comme un message de vie, de cet inconnu dont elle ne saura jamais rien.
A la fin de l’émission elle a choisi « Live and let die », des Beatles.
…………………
à l’écorce, la pulpe dont est fait
celui qu’on rencontre
à ce qui se partage sur le plateau des tables
l’ombre d’un verre transparent, en diagonale dans le soleil.
à la fin de la conversation
à l’écho dont les mots sont entourés, et qu’ils appellent
longtemps après, au-delà de leur sens :
comme des arbres : forêt, troncs, futaie de mots, debout, oubliés
grands frères que baigne la lumière du haut
l’expérience.
à ce qui vient de moi et qui me revient,
comme un boomerang ou un oiseau, issu de ma propre pulpe
après avoir fait le tour de celui qui se tait.
ma pensée glissant ses tentacules
dans les rainures de ses mots.
à ce que j’ai pu entendre ensuite, à nouveau seule.
le bruit du monde peut-être, du Monde-hors-de-moi, inarticulé.
…………………….
J’ai été frappée par ce récit (il s’agissait de Michèle Lesbre, parlant de « Ecoute la pluie ») ; je me suis dit que la rencontre est comme une pierre, qui vient trouer l’eau de notre mare. Que faisons-nous des échos de ce choc, de cette irruption ? de ces cercles qui s’élargissent, qui vont si loin, jusqu’au bord ; du mouvement dans les profondeurs, de la vase soulevée ?
Cet homme est venu devant elle avec une injonction : « fais quelque chose de moi, toujours vivant en toi », avec ces quelques mots et son sourire…et il est mort. C’est parce qu’il aimait les autres, sûrement, qu’il n’a pas choisi de sauter en baissant les yeux, en se cachant. Et c’est à cause de cet amour qu’elle n’a pas pu être en repos pendant longtemps. J’imagine la colère qu’elle a dû ressentir : « pourquoi tu me fais ça à moi ? ». Mais elle a fait quelque chose de lui « vivant ».
L’autre nous dit toujours : « débrouille-toi de moi ». J’ai beaucoup ressenti ça devant les tout petits bébés, les miens : « tu m’as voulu, tu m’as eu, maintenant il faut que tu te transformes pour moi ».
La poésie sait utiliser les mots de façon particulière pour dire l’écho, les cercles concentriques de la rencontre. Pas seulement des autres, celle du monde aussi.
……………….
Plus tard, en relisant le poème, remonte mon plus vieux souvenir : purement sensoriel, un souvenir d’entrée dans le sommeil, une sorte de froissement soyeux à l’intérieur de l’oreille, et un contact de toile d’araignée…..un bien-être particulier que j’ai longtemps tenté de garder en mémoire enfant. Je me souviens que je me disais : il ne faut pas l’oublier
série de l’eau
par claire le 5 février, 2013
Rester est une superbe chose (Florian)
1
la pluie atteindra bientôt le fond
de l’anfractuosité sèche
elle touche d’une main froide ce qui dort là
qui dort toujours
– bouge et grommelle dans son sommeil.
dans le fond de son rêve vibre et flagelle
une vision trouble un murmure
bullant sous la pellicule d’eau.
la pluie blanche en lent rideau venant vers lui efface la mer
elle pénètre de son eau
ce tas de chiffons trouvés, ce vieil imperméable
cette similitude.
de l’autre côté de cette pluie,
un arc de cercle
isole une petite partie du monde, un lieu commun
où écouter le bruit de la pluie
mesuré du souffle du dormeur.
2
Après une longue conversation j’ai regardé dehors, j’ai vu la pluie sur le jardin, sur les oliviers. On était en alerte orange, j’ai pris ma voiture vers une jardinerie éloignée.
Là, le parking était presque vide, sous des herses d’eau verticales, et presque personne à l’intérieur – à part quelques employés vêtus de lourds imperméables, qui échangeaient avec moi un regard, et les derniers clients qui partaient.
La jardinerie est grande, à certains endroits les plantes sont à découvert, à d’autres la voûte laissait couler une pluie filtrée, d’autres étaient à l’abri. Je passais, tout à fait seule, dans un décor d’apocalypse tropicale, grands pots renversés, gravier noyé d’eau, puissantes cascades des gouttières, plantes respirant vertes et épanouies sous le déluge. Allées, arbustes, centaines de godets alignés, tuyaux comme des serpents immobiles. J’ai soigneusement choisi, je suis passée à la caisse, avec mon sac de cuir trempé. La jeune femme attendait mon départ pour fermer bien avant l’heure.
En revenant je me suis trompée de route, et je me suis trouvée obligée de passer par les gorges d’Ollioules, un défilé sinueux entre de hautes roches, noyées de brumes et de pins noirs. Et puis la petite montagne qui se trouve derrière chez moi, le col à grimper sous la violente pluie d’orage et après le col, un épais brouillard blanc.
3
La neige pose sur la mer un drap léger
épais tombant
de toute la hauteur du ciel
elle se couche sur elle encore et encore…
toujours le même mouvement
même la nuit dans l’obscurité
– comme la mère borde d’un drap
blanc l’enfant qui s’endort –
la neige embrasse l’eau et s’y fond,
comme l’enfant qui dort
coule à l’intérieur de la mère-rêvant
de la mer-sommeil qu’elle est devenue.
je traverse un pays presque vide
des plaines longues, rousses et brunes dans la lumière d’hiver
un collier de montagnes autour.
la route est comme un diamètre mouvant.
ta mer est loin de la mienne
combien de temps pour que l’eau de ta neige
atteigne la plage où jouait hier la fillette en anorak vert ?
jambes nues, pieds rougis d’eau froide
la fillette maigrichonne a trouvé une grosse pierre qui lui plaît
trempée elle la pose
au mileu d’une grande flaque, sur des galets empilés.
4
car c’est ce que je désirais (rêve du fleuve)
par claire le 4 janvier, 2013
J’ai rêvé cette nuit une chose étrange, un long rêve. J’avais un voyage à faire, un voyage dans un fleuve, et ce fleuve c’était le Nil. Mais ce n’était pas un voyage « sur » le Nil……la plus importante partie du voyage se passait à nager dans le fleuve, à me laisser entraîner sous la surface, d’affluent en petit port, de rive en milieu de courant, chargé d´objets flottants. Certains endroits étaient dangereux, à cause de tout ce qui encombrait l’eau noire et plutôt sale, à cause des innombrables embarcations qui se croisaient en désordre, ce désordre particulier des pays pauvres, où chacun sait avec une habileté presque surnaturelle tirer son épingle du jeu, se faufiler, mais où nous sommes si apeurés et maladroits et débordés, trop habitués à l’ordre et la sécurité. Pour autant, moi aussi dans le rêve, je m’en débrouillais bien, je n’avais pas peur. Quand je dis « moi », c’est plutôt le rêveur, moi-celui qui rêvait, qui nageait. Il n’ y avait rien de féminin en moi, ni même (presque) une quelconque identité. J’étais le nageur-rêveur, un occidental depuis longtemps familier des eaux de ce fleuve. Habitué de défis inutiles, quelqu’un qui n’existait que dans les mouvements de la nage, l’attention aux obstacles et aux dangers, l’indifférence à la saleté inévitable. S’approcher des quais, être juste une tête mouillée dans l’obscurité, qui se déplace silencieusement entre les pilotis vaseux, les barques plates et les bidons.
Au cours du rêve je sortais souvent du fleuve, et pour certaines parties (sans doute plus difficiles) du voyage, j’allais sur une sorte de ponton flottant rejoindre deux hommes dont c’était le métier : accompagner, aider les voyageurs. Des gens du pays, que je connaissais depuis longtemps. Alors pour un jour ou deux je me laissais conduire, et dans ces moments où j’étais hors de l’eau, dans leur espèce de bateau un peu pourri, leur habitude du fleuve et de ses méandres, il me semble que j’étais une femme. Mais une sorte de femme fatiguée et intéressée seulement par ce qu’elle a à faire, qui se tait. Ma mère apparaissait dans le rêve juste un instant, participait à l’organisation du voyage, puis disparaissait.
Quand le réveil est venu, c’était trop tôt. J’ai lutté un moment pour rejoindre le rêve, replonger, car c’est ce que je désirais. Mais en vain.
eau noire, entrée
dans les moindres replis du corps dans les oreilles
la grotte étroite des narines et l’eau salée des yeux
je te partage avec toutes ces choses
qui s’écartent pour me laisser passer – eau sale
de tous les rejets de la vie tu ne pourrais rien salir
tu lisses
ma peau en toi, en qui je glisse.
j’ai quelques connaissances et quelques rappels
j’ai le plan des villes je connais quelques mots
je sais ce que font les gens qui se penchent
accroupis, à genoux – et la forme du contenant
qu’ils plongent dans tes reflets
l’écharpe de tes algues
reflue le long des pontons.
et certains t’habitent, on devine
l’éclat de leurs dents quand ils parlent
dans le noir j’entends (de là où je suis)
leurs rires planant sur la fumée d’un feu
dans la chaleur humide du soir
leurs épaules sont comme des poissons lisses.
alors je me retourne je plonge
vers le milieu du fleuve la rive opposée
presque invisible, de brumeux signaux au loin
il est temps de redevenir aveugle
de descendre dans le froid obscur et simple
au fond le courant est sans nuance
muscle serpent et roi invisible
je vais avec lui qui n’a qu’un seul sens.
Babel
par claire le 19 décembre, 2012
J’étais soudain envahie par un temps organique, boueux, j’étais soumise au balancement des branches, à la fissure jaune des feuilles, à l’odeur du froid si particulière. J’étais dans le Nord, dans les herses de taillis bordant le haut des collines, la nacre d’ailes nuageuses contre le ciel, la dentelle des clématites sauvages, beige posée sur des massifs d’arbres, escaladant leur architecture. Au pied de mon talus, comme une langue d’eau qui se retire, un grand étang lamé de vent, pas de miroir. Et cette fumée qui semble nimber l’horizon en hiver, fumée inodore et sans feu, la baisse de la lumière rouge du soleil dejà disparu, caché. Tant de pureté, tant de repli, le silence d’oiseaux à demi-saouls de froid. J’étais dans une exposition de tableaux, de paysages anciens, leur mille détails leurs mille collines, les ponts sur les minimes rivières, les chutes d’eaux transparentes, les rochers acérés au dessus du vide. Les plantes les oiseaux et les bêtes rampantes, les hommes vêtus à l’ancienne et les diables tous extraordinaires, avec leurs dents acérées leur sadisme, leurs membres aberrants saisissant des corps nus.
Et les saints minuscules nimbés de petites lumières qui priaient, encerclés de prodiges, dans des grottes où venaient des femmes nues au seins hauts. J’étais triste, je marchais de tableau en tableau.
C’est là que je pensais, à ce que je faisais de mon temps, à des loyautés, à ce que je ne pouvais quitter sans arracher toute la terre arable, initiale, de mon jardin.
A cet autre jardin, sec, vert sombre, rose du ciel du matin et du vent, parcouru d’effluves en toutes saisons, armé contre son soleil natal, recuit, lointain. A ceux qui n’y viendraient jamais.
Mais j’étais dans la ville du Nord, dans ses rues et ses musées, ses restau dorés et leurs bonnes nourritures, l’alcool après le soir glacial, les rires et les amis. Et en même temps j’étais dans le vide, dans un corridor nu, j’étais poussée dehors.
Comme une barque dont quelqu’un m’avait durement poussée du bout d’un bâton, du côté des touristes, hors de son pays et de ses habitants. Mais j’étais depuis longtemps hors du mien, des gens qui parlent fluidement et sans effort, qui s’intéressent à ce qu’ils disent, qui nagent dans la réalité.
J’étais dans la barque repoussée, et sans rame, je tournais lentement au milieu de l’étang huileux et doux, du courant, un grand héron dépliant soudain son vol au dessus de ma tête, et, en le suivant des yeux, je voyais alors trouant les nuées du Nord, perçant le ciel flamand, cette tour herculéenne qu’ils ont contruite depuis des siècles et des siècles, en briques cuites et cramées au soleil d’Asie Mineure, qu’ils contruisaient et reconstruisent sans cesse, en verre et acier et béton, surtout béton et poussière, sur toute la surface plane de la Terre, d’où suinte leur haine des différences, leur misère, et tout ce qu’ils ont extrait de ses entrailles, au prix de leur vie souvent, pour empoisonner ou escalader ou conquérir leur ciel, toujours en plus grand nombre, milliers et milliers de centres du Monde, milliers et milliers d’ossements encore vêtus de chair vivante, bientôt à enfouir, à cacher.
Cette tour que Dieu ne put admettre, et qu’il écrasa de Sa main d’Enfant capricieux, les dispersant, dispersant leurs visages et leurs langues, les faisant différents. Et moi j’étais là, celle d’aucune langue…
Du bord de l’eau je regardais la Tour qui commençait visiblement à se fendre, à trembler, les gens des hauteurs tombant en criant, et ils tombaient sur les contreforts, puis sur ceux des bidonvilles, saignants disloqués dans des flaques irisées de fuel.
Et moi qui n’étais plus de nulle part, je n’avais plus aucune raison de bouger.
novembres
par claire le 24 novembre, 2012
J’ai rêvé de mon père la nuit dernière
il marchait – mains dans les poches,
à la tombée du jour
près de ma mère
et de ma petite sœur
toute petite.
La rue éclairée
ce soir s’ouvre
comme un livre, là-bas au bout
sur le ciel et la mer
du même bleu éteint
le bateau de la Seyne sur Mer
attend pour accoster.
Novembre est là.
Il portait un grand manteau sombre,
ouvert
le col relevé,
une chemise bleu nuit
et une cravate.
Il me disait en souriant :
« j’ai eu envie d’être bien habillé ».
(lui qui en avait si peu à faire
dans la vraie vie).
Je lui disais : « tu es magnifique. »
Je me souviens de ma petite sœur
adulte
devant le cercueil ouvert, disant :
« il a toujours été beau mon papa ».
et c’est tout.
la faim
par claire le 20 novembre, 2012
il y a ce bruit, dans l’eau
les graviers pris dans l’épaisseur du torrent
et le même bruit dans les nuages
qui couraient au-dessus
lourds chevaux gris de labour passant
s’ouvrant en rideaux de pluies brutes
là-bas sur la mer
– entre la mer et moi.
il y a ce bruit qui se coupe et se retourne
semble vouloir effleurer
comme une feuille la surface de l’eau
reflétant le ciel,
la journée libre.
j’entends ce bruit, cette invention sauvage
où la perte joue son grand rôle.
dans ce jeu dont j’ai faim encore
l’eau glacée glisse toujours,
laissant les galets en repos ou les retournant
elle les broie dans sa main, arrondis.
le jeu m’a jouée
dans un recoin de la rivière
je tâche de voir le ciel à travers l’eau
je tâche de comprendre
où va ce qui n’arrive pas,
où est le lien qu’on ne rompt pas.
à l’intérieur de la poitrine
ou dans le flux de l’eau
le courant est comme du verre
verre épais d’une baie mouvante
l’eau brasse son bruit,
ce qui s’était posé
et doucement repart.
comme le vent dans les branches
par claire le 5 novembre, 2012
.
Je regarde filer les bordures les arches
le tracé des lumières
rouges ou blanches, joyaux pour orner la pénombre
longs serpents en double sens.
Une porte imaginée entre les collines, comme deux épaules de terre
et les arbres, les buissons graphiques, les ombres portées
dans la pluvieuse nuit d’automne
une traîne de peur qu’on laisse glisser derrière soi.
Tout semble simple :
le vent les branches, l’encre du soir
arbres et lisières où le temps s’aligne
dans le fleuve chaud du voyage parle à mi-voix
une langue qu’on n’apprend nulle part.
Je ne suis là finalement que pour dire
ces arbres noirs contre un ciel d’ardoise
cette porte sans montant ni seuil
et ce que je vois en cet instant tranquille
laissant défiler une beauté-qui-ne-peut-se-dire.
Pour décrire, ou juste voir la porte
le double collier lumineux, les arbres
qui rappellent l’histoire, s’exclament
sans mot ni bruit.
Ecrivent de leurs grandes branches, de leurs cimes
de chaque feuille trempée dans le soir glacé
cette frange où s’éteint la lumière.
Et moi je suis morte je suis parfaite
je suis un duo de phares
rouges dans un collier qui glisse
glisse et coule et je vais
là où je Vais.
.