Claire Ceira

deux photos

par claire le 13 juillet, 2014

Il y a une colonne
qui supporte une galerie couverte
une cour dallée – un arc en plein cintre.
une fillette floue
tournée de l’autre côté
lève le bras.

Tout ce qui était là, dans la lumière fossile du jour
a déjà disparu quand tu revois la photo
mais l’architecture et la paroi des vitres,
d’où coulait vers l’intérieur cette lumière de fin de journée
(membrane transparente qui définit l’intérieur)
persistent sans doute,
existent encore.

la cour n’est pas isolée vraiment
il y a un passage…
et naît l’histoire
de la fillette floue et de son petit chien
qu’elle était allée promener
par les rues intimes de sa ville
vers cette cour,
passant sous l’arc en plein cintre.

ville où auraient peut-être vécu
ses grand-parents paternels
depuis les années soixante.

Il leur arrivait alors
de passer une heure calme
dans ce qui était encore un café
assis à parler dans la pièce sombre

et tout en parlant ils regardaient dehors
c’était – qui sait ? – le printemps,
fixant sans le voir
l’espace exact où se tiendraient
quarante ans plus tard leur petite-fille
et son chien roux.

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Il y a une épaisse colonne
qui supporte la galerie, une cour
dallée, un arc en plein cintre

un punk avec son chien – flou
est tourné de l’autre côté
il lève à demi le bras.

Beaucoup de ce qui était là
dans la lumière fossile du jour
a déjà disparu quand tu regardes
mais la paroi fragile des vitres
d’où coulait vers l’intérieur
la lumière de fin de journée
(membrane transparente entre dedans et dehors)
elle persiste sans doute, elle existe.

La cour n’est pas vraiment isolée
on y entre par un passage
étroit depuis la rue – l’impression
d’intimité est pourtant là, sensible.

On peut même construire une histoire
du garçon et de son chien
qui auraient erré tout le jour
par les rues de cette ville
jusqu’à la cour retirée tranquille
qu’il ne connaissait pas, passant
sous l’arc en plein cintre.

Ville où il le saurait, autrefois
auraient vécu ses grand-parents maternels
dès la fin des années soixante.

Passant jadis une fin de journée
derrière ces vitres, assis à parler
dans cette pièce qu’on devine,
qui était alors un vieux café,
et où il n’entrera jamais.

Tout en parlant ils auraient regardé
au dehors. Ce serait peut-être
le printemps…..fixant sans le voir
l’espace vide où se tiendraient
quarante ans plus tard, dérivants, leur
petit-fils ivre et son chien.

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