Focale (13)
par claire le 21 juin, 2018
C’est un petit garçon solitaire, un fils unique, chez sa grand-mère. Elle vit sous les toits dans deux chambres de bonne accolées, où a été installée une minuscule cuisine. L’enfant passe ses vacances chez elle, il dort dans un petit lit couvert d’un édredon. Il joue, lit les magazines empilés, les cartes postales qu’elle garde attachées par un élastique. Tout vient du temps d’avant.
Il se sent protégé ici, spectateur des activités ménagères toujours semblables, dans la vieillesse éternelle des objets.
Surtout, la magie de cet endroit, de ces journées, c’est le toit sur lequel donne la fenêtre de la chambre. Il est relié à d’autres toits, à d’autres pentes recouvertes de zinc, d’où émergent des cheminées avec leurs multiples petits chapeaux. Un monde clos qu’il peut arpenter sans risque, où il faudrait aller loin pour voir le bord, le vide. Il n’en a nulle envie. Il a même un petit tricycle et roule dans les parties basses, variant les trajets, les obstacles.
L’enfant a mis un masque noir, une cape, il regarde droit devant lui et fait mine de viser. Derrière lui, les hauts murs parcourus de conduits de cheminées font les murailles d’un château fort que lui seul hante et défend, juste au-dessous des nuages. Les plaques grises de zinc soudées entre elles, comme un patchwork dessiné de pluies anciennes, les murs aveugles, les lucarnes couchées reflétant le ciel blanc, une beauté d’énigme qu’il garde.
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