Claire Ceira

C’est une pièce (5)

par claire le 29 mai, 2012

…..elle est entièrement vide, baignée de soleil qui dessine sur le plancher (ou le lino ?) le feston de l’ombre d’un toit. Il y a les murs blancs, les plinthes, le radiateur sous la fenêtre, un store avec une ficelle. Rien d’autre. La présence du soleil venu de dehors est la seule chose qui parle de mouvement, de changement, de temps. La pièce a été vidée de tout ce qu’y avaient mis ses habitants. Elle est entre-deux.
Peut-être c’est le jour de l’état des lieux, ce dernier jour où on revient avec le propriétaire, voir s’il n’y a pas de marque sur les murs, si rien n’a été abîmée ou détruit. C’est un petit moment de tension, on est entre gens polis, mais quand même, a-t-on dégradé ce bien qui nous était laissé en jouissance, cette enveloppe qui nous protégeait et qui nous avait été seulement prêtée ? L’argent est là, au milieu, et l’éventuelle dissimulation d’une négligence, la suspicion.
Tout cela empêche que ce dernier moment soit ce qu’il devrait être : un moment d’adieu à ce qui fut, là, vécu. La nudité de la pièce, déjà offerte à d’autres qui vont venir, vous tient à distance. Elle n’appartient qu’à elle, finalement : à ce volume d’air, à cette tiédeur de soleil, à cette beauté nue et banale, à tout son passé.

Cette nuit j’ai rêvé que j’étais morte. C’était arrivé dans une grande explosion de chaleur, de lumière, de violence. J’avais ce souvenir du dernier instant. Ma petite fille était morte aussi avec moi. J’étais là, sans être là, avançant au milieu des vivants, mes proches. Je promenais leur tristesse et la mienne dans la vie qui m’avait été ôtée. J’avais surtout le chagrin de cette petite fille disparue, que je cherchais peut-être, qui n’était plus là, et qui n’avait presque rien vécu.

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