Claire Ceira

nocturne

par claire le 11 avril, 2016

il m’arrive d’écrire encore dans ma tête, car rien ne remplace pour moi ces lettres, leur voix intérieure, leur appel vide. et rien ne remplace l’attente vide, sa puissante densité.
je ne les adresse pas, il n’en est plus question.
ce serait absurde et je suis allée loin dans le beau pays de l’absurdité, allée et revenue.
et je me repose dans l’oubli de cette question. dans ma patrie non-absurde.

mais je suis amputée, c’est évident, du membre fantôme
irrigué de ce courant-là.

je suis dans cette pièce où quelqu’un dort. la ville est tout autour – après la pluie, la nuit. tous ces kilomètres que je fais, pour voir mes enfants, mes amis.

j’ai moi-même fermé la frontière trouble
pour le temps de cette vie.
je ne reverrai plus jamais la maison des origines
ni les longs jeux dans le soir
ni ceux que j’ai suivis, d’île en île boueuse, et sans me laisser voir
ni la voix qu’appelaient ces lettres.

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