(moi)
par claire le 25 août, 2015
1
après une journée passée seule
quelque chose se raccorde
retrouve l’enfant de soi
l’enfant de la voix de la
seule solitude
toujours dans cet espace blanc, si grand
comme une pause
ample et sans écho, un coton de nouveau-né.
laisser de l’autre côté de la baie le croissant de lune
la table de mosaïque froide et le vent
alentour.
.
2
le passé s’éloigne et se dévitalise.
on doute de lui, c’est comme un roman lu il y a longtemps
dont on a oublié la fin.
l’avenir met son curseur pas très loin du bout de la règle,
c’est avec le présent qu’on a à faire.
comme être un animal bien précis,
une chatte borgne qui aime se tenir
sur un muret ombragé à l’affut de tout ce qui passe,
ou une vache au pré dont l’oreille porte un numéro en plastique.
se dire qu’aucun autre corps n’est
ce corps-là .
.
3
une géode. autour, le monde immense dans lequel elle est prise, enchâssée, un monde en mouvement de roches métamorphiques, plein de beautés et de menaces, plein de choses inconnues, d’infinités de façon de les voir, de les décrire, un monde qui peut-être est entré dans une catastrophe ou s’hypnotise sur elle. une impression d’accélération vraie ou fausse, de chagrin impuissant, d’effroi, de joie fausse, de faux plaisirs.
mais aussi d’un éternel bouillonnement, recommencement.
plus près du centre, entourant le noyau et la cavité centrale, comme la chair d’une pêche : les proches, les autres, les actes, la vie diurne. On doit penser à pas mal de choses, ne rien oublier, et comme c’est facile finalement, cette préoccupation toujours renouvelée, cet oubli de soi. La chair du fruit c’est en tout cas ce qui est vivable, palpable, visible, aimable, ce qui a un sens évident. peut-être la seule chose qui devrait vraiment compter.
mais il y a aussi un noyau, brun et râpeux, presque noir. quelque chose de coupable et de manquant, une honte de soi qui vous saisit au réveil, une géode, oui. triste et souvent mauvaise avec au centre, dans une larme de liquide, un embryon qui voudrait naître, qu’on aime.
.
4
En train, sur une assez longue durée, une sorte de zone industrielle avec ces énormes bâtiments préfabriqués qui se ressemblent, les gazons cernés de bordures de ciments, les sigles, les drapeaux qui pendent aux mâts. Quelqu’un est venu taguer ces grands murs de tôle, d’énormes lettres molles pas très belles, un travail sans inspiration où il s’agit surtout de laisser sa trace, et c’est fait avec beaucoup de persévérance car il y en a sur au moins un kilomètre. La peinture employée est en partie argentée, qui reluit et brille dans la lumière atténuée et presque horizontale. Du coup c’est beau, surtout que les feuilles des peupliers tout autour luisent de la même manière en s’agitant dans le vent. Le train passe, on arrive à Toulouse bientôt, on a quitté la végétation méditerranéenne pour une épaisseur plus verte d’arbres et de talus où les mauvaises herbes dressent de grandes hampes. Bientôt elle vont grainer. Je reviens chez moi.
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