Dans un bar un peu louche, une lumière verte éclaire un désir vulgaire, contente tout de même un reste d’appétit, déclenche une petite lueur dans un néant. Il y a du danger, une accumulation de diverses méchancetés affichées, mâles ou femelles.
Un sentiment d’étranglement mais aussi de libération arrachée aux mains de ces présences rigides, comme un dernier relent de vitalité dans la mare obséquieuse d’une accumulation de misères. J’ai envie de boire. De consommer le mal et la stupidité, de m’anéantir dans cette rengaine qui n’impressionne plus personne.
J’ai été aspiré par ce quartier nocturne de bars un peu louches – ils le sont tout à fait. Je reste à l’écart, mais tous ont des yeux vides, exhibent une curiosité morne ou morte, et m’observent d’un désir bestial. Profiter, rentrer dedans. Je subis puis j’oublie.
Ils ont souvent vu ce cas de figure – ma présence ici – sans jamais s’y être penché : ils ne se penchent sur rien. Rien d’autre que leur tombeau. Aucun secours à leurs vies sinistrées.
»
Je vis des prostituées partout. Les unes debout sur leurs jambes découvertes et lasses, d’autres qui jacassaient et ricanaient, toutes les mêmes, débauchées qui me soudoyaient du regard. J’eus envie de fuir et d’accepter leurs services à la fois. Je les voyais déferler en masse par les avenues et profiter de ma faiblesse maintenant célèbre, car il faut croire qu’elles me connaissaient toutes, elles remuaient mon prénom dans la jungle de leurs dents et pressaient mes désirs partagés de leurs lèvres, si bien que j’acquiesçais à leurs avances par les yeux mais pressais le pas, celui du foyer et celui de leurs corridors étranges.
Tout fut fondu dans une coupe de ciel et d’esprit divisé, une canicule d’amour – cet amour particulier, furieux revers d’un manque – prenait peu à peu le pas si bien que je repassais par les rues parallèles en sens inverse. Tout de même je m’éloignais progressivement, et tout s’estompait en cadence jusqu’à prendre un tour presque normal, si ce n’est quelques têtes aguicheuses ou prostrées qui subsistaient.
Je fis sûrement un amalgame entre ces filles habituellement désirées et celles-ci qui se vendent. Mais tout peut s’acheter. Tout est à sa portée quand on sait s’y faire, et que l’on possède, ou croit posséder – ça n’y change rien – ce vers quoi elles s’inclinent, ces mêmes que l’on désire. Et ceci, j’ai cru l’avoir, mais le néant m’a vite repris. C’est comme une fleur qui fane, rapidement et nous fait marcher le pas vide. Vide jusqu’au prochain désir pris à la volée.
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